Fusion TF1/M6 : «Pour un audiovisuel plus attractif»

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Une interview de Magali Delmas, DG du groupe Heroïks, en charge du trading offline et vidéo, sur les enjeux de la fusion TF1/M6

 

CB Expert : Comment avez-vous accueilli l’annonce du projet de fusion entre TF1 et M6?

Magalie Delmas : C’est une annonce à double tranchant. Mais nous l’accueillons plutôt positivement car nous en avons tous besoin, dans le PAF, pour soutenir l’attractivité du média TV et globalement de l’audiovisuel. Nous avons cependant un peu d’appréhension quant à une possible inflation de la TV, car nous avons beaucoup d’annonceurs avec des problématiques ROistes (e-commerçants, pure players)… Ils utilisent la T V comme ils utilisent le digital. Plus le CPM (coût pour mille) sera élevé, plus le CPV (coût par visite) le sera aussi. Si demain la TV n’est plus aussi rentable, ils réduiront leurs investissements.
Cependant je pense que cette inflation sera modérée, car je ne vois pas TF1 et M6 mettre en péril l’attractivité du média. Leur objectif sera de maintenir cette dernière face aux grandes plateformes digitales. Ils proposeront peut- être de nouvelles façons d’acheter. Quand on pèse 50 à 70% du marché T V, on peut facilement imposer de nouvelles normes, de nouveaux standards, de nouveaux modes d’achats : modes programmatiques, univers Global TV/ vidéo, achat du replay en CPM par exemple.

CB Expert : Pourquoi cette fusion rendrait-elle l’audiovisuel plus attirant pour les annonceurs?

Magalie Delmas : Depuis quelques années, certains contenus TV sont moins attractifs et cela peut devenir problématique. De plus, les téléspectateurs d’aujourd’hui viennent chercher un contenu, plutôt qu’un rendez-vous. Si demain on se retrouve avec des meilleurs programmes, avec des budgets permettant de construire une fantastique plateforme de replay réunissant les contenus de TF1 et M6, la TV sera plus attractive pour tout le monde, spectateurs et annonceurs. D’autant plus que TF1 et M6 sont bien placés en termes de brand safety, que ce soit en linéaire ou en non linéaire. Quand on diffuse des spots sur MyTF1 ou sur 6Play, on a une vitrine d’exposition que l’on ne retrouve pas ailleurs.

CB Expert : Commercialement, que pourraient-ils faire?

Magalie Delmas : Je les vois bien briser la barrière entre le replay et la TV linéaire, créer des plateformes où l’on achète en CPM global. La TV est le média le moins cher du marché. Si on compare le CPM de la TV linéaire avec celui de la VOL (vidéo en ligne), la TV reste ultra-efficace. D’ailleurs, les études d’Ekimetrics confirment que le ROI de la TV est largement devant celui des autres médias. Sur la rentabilité, ils ont de la marge par rapport aux plateformes (Facebook, YouTube). Mais, encore une fois, il faut que l’attractivité soit au rendez-vous.

CB Expert : Quel regard portez-vous sur le retour de la publicité de France TV en Prime-Time?

Magalie Delmas : Cela rassurerait les annonceurs, en recréant une concurrence, une compétitivité du marché. Le duopole TF1/M6 passera plus facilement. Cela rebattra les cartes et France TV retrouvera tout son attrait. Avec le prime et le night-time des chaînes publiques, nous pourrons mieux toucher les petits consommateurs TV, les cibles CSP+ et les cibles qui regardent potentiellement moins TF1 et M6 – ces deux chaînes ayant d’ailleurs des profils de téléspectateurs assez semblables. Nous atteindrons aussi des audiences différentes de celles que l’on rencontre sur France TV dans la journée, où le profil est plus âgé.
Et cela permettrait de faire face à la forte demande actuelle, dans un contexte où la durée d’écoute TV n’ira pas en augmentant.

CB Expert : Et quelles seront les conséquences pour les autres régies TV?

Magalie Delmas : Je m’inquiète davantage pour les « petites » régies. Si un annonceur dispose d’un budget d’un million d’euros, aujourd’hui il peut faire une exclusivité TF1 Pub ou M6 Publicité, et compléter son plan avec nombre de petites chaînes de la TNT et du câble.
Demain, avec un million d’euros, est-ce qu’il ne sera pas tenté de tout mettre sur TF1 et M6 ? Bien sûr cela dépendra de ce que deviendront les chaînes TNT que TF1 et M6 devront vendre. Mais si demain, il y a une inflation TV de +10 à +15 %, les petits et moyens annonceurs devront encore plus concentrer leurs investissements, et cela favorisera forcément les plus gros acteurs.

CB Expert : N’y a-t-il pas un risque de réduction de votre valeur ajoutée vis-à-vis des annonceurs ?

Magalie Delmas : Au contraire, notre valeur de conseil va être de plus en plus importante. Il ne faut pas résumer la valeur de l’agence média à l’achat sur la TV linéaire. Les questionnements sont nombreux : va-t-on communiquer en TV adressée? sur le replay? sur la VOL? comment orchestre-t-on ces canaux? avec quels budgets? en mode programmatique ou non? Le rôle de conseil de l’agence sera primordial sur ces sujets, sur l’orchestration qui permettra de toucher au bon moment, au bon prix, les bonnes personnes.
Notre façon d’acheter la TV doit évoluer et intégrer totalement le digital, pour rendre les choses plus faciles et logiques. Aujourd’hui, quand les chaînes T V linéaires sont trop encombrées, mais qu’il y a de la place sur le replay, c’est compliqué, il faut faire deux négociations. Si demain, on a une vision globale, avec une négociation globale et probablement une plateforme programmatique, on passera plus facilement de l’un à l’autre en fonction de là où est l’audience.

Magalie Delmas est DG du groupe Heroïks, en charge du trading offline et vidéo 

Propos recueillis par Emmanuel Charonnat


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