Les médias audio aux USA : crise et renouveau

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En Direct de New York – chronique des médias et de la publicité aux USA, par Vincent Létang, Magna (IPG Mediabrands)

Vincent Létang, EVP, Global Market Intelligence, chez Magna (IPG Mediabrands), nous décrit 7 tendances du marché américain, qui peuvent nous éclairer sur le futur des médias en Europe.

Retrouvez ici la tendance n°1 : Consommation TV : l’audience live continue de s’effondrer

Tendance n°2 :
Médias audio : crise et renouveau

Plus encore que la télévision, la radio semble moribonde aux USA. Les diffuseurs aiment rappeler que la couverture hebdomadaire (le reach) de la radio reste très élevée (89% des 18 ans et plus) et qu’elle s’érode plus lentement que celle de la télévision. Tout cela est vrai, et le public reste fidèle à la radio, en particulier durant le «morning commute» dans les voitures. Néanmoins, les cibles jeunes décrochent tout autant que sur la TV : 11 heures d’écoute par semaine pour les 18-34 ans contre 14 heures pour l’ensemble de la population. La radio AM/ FM ne représente plus que 46% du temps dédié aux médias audio, contre 54% pour les plateformes alternatives (satellite, streaming audio, podcasting).

La baisse du volume d’écoute, la stagnation des CPM (signe d’une demande faible) et le report massif des annonceurs locaux (commerces et concessionnaires automobiles) vers les plateformes numériques, figurent parmi les causes de l’érosion des revenus publicitaires que nous constatons depuis cinq ans, malgré l’environnement économique porteur (-2,2% par an en moyenne sur 2013-2018). Écrasé de dettes, le leader du marché, iHeartMedia, a dû se placer sous la protection du «Chapter 11» («Bankrupcy») pendant plusieurs mois, pour pouvoir recapitaliser et se réorganiser.

La bataille de la radio musicale est probablement déjà perdue, car les jeunes générations ont basculé vers le streaming et ne reviendront pas vers les radios linéaires. Spotify et Pandora cumulaient 130 millions d’utilisateurs début 2019. Mais la bataille du talk (info, sport, talk-show) reste jouable, si les acteurs de la radio se révèlent capables de gérer le tournant du contenu à la demande, comme l’ont fait les acteurs de la TV avec le lancement de Hulu il y a dix ans. Ces derniers ont en effet accompagné avec succès l’évolution des pratiques pour optimiser les recettes publicitaires totales de leurs shows et conserver une place centrale dans l’écosystème vidéo, au risque de cannibaliser leurs propres ratings.

La consommation du podcast est plus élevée aux USA que partout ailleurs. Alors qu’ils étaient 20 millions en 2013, 90 millions d’Américains écoutent aujourd’hui des podcasts au moins une fois par mois, soit 32% de la population. Et chaque semaine ils sont 22% à le faire, avec une consommation moyenne de 5 épisodes par semaine. Alors que les opérateurs de streaming sont désormais tous focalisés sur le modèle premium avec abonnement, le podcasting reste essentiellement gratuit et financé par la publicité. Les revenus publicitaires prennent la forme du parrainage (« this show is brought to you by… ») et aussi, de plus en plus, via des insertions dynamiques, basées sur le timing du téléchargement et les données disponibles sur l’auditeur.

Au cours des cinq dernières années les principaux annonceurs du podcasting ont été des marques «Direct to Consumer» et des pure players comme Airbnb. Mais depuis deux ans, de grandes marques comme Nike, Coca-Cola, BMW et les hypermarchés Target commencent à inclure des podcasts dans leurs campagnes audio. Les bénéfices sont multiples : audience jeune, urbaine, aisée, de plus en plus difficile à atteindre via la radio et la TV, et de très bons niveaux d’engagement et de reconnaissance. Le seul problème réside dans la mesure des audiences, notamment la difficulté à évaluer la consommation des podcasts téléchargés puis écoutés offline.

Magna anticipe que les recettes publicitaires du podcasting atteindront 700 millions de dollars cette année et approcheront le milliard en 2021. C’est encore peu au regard du marché publicitaire audio total (radio, streaming, podcasts) estimé à 16 milliards, mais la croissance du «on demand» devrait contribuer à stabiliser les recettes publicitaires de l’industrie audio.

(à suivre, cinq autres tendances…)

Vincent Létang
@vletang_magnaglobal

Français d’origine, expert international sur le marché publicitaire et l’industrie des médias depuis 25 ans, Vincent Létang a vécu et travaillé en France et en Grande-Bretagne avant de rejoindre MAGNA (groupe IPG Mediabrands) en 2011. Désormais basé à New York, Vincent dirige les études de marché et la prévision sur les recettes publicitaires mondiales. MAGNA Intelligence publie plus de 40 rapports par an sur les tendances du marché publicitaire (programmatique, search, affichage, podcasting etc).


Lire aussi :

. Le communiqué de Magna «Podcast Ad Spending approaching $1 billion»

. Toutes les chroniques «En direct de New York» de Vincent Létang

. USA : l’audience TV live continue de s’effondrer (septembre 2019)

. Publicité média : cartographie des prévisions 2020 de Magna (IPG Mediabrands)

. USA : la qualité du contenu au coeur des investissements de la pub vidéo en ligne (mai 2019)

Le bilan 2018 de la pub digitale aux US en 11 graphiques  (mai 2019)

. Le marché mondial de la musique a encore accéléré en 2018, sauf en Europe (avril 2019)

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